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Le temps des Avelines

Le temps des Avelines


Tango-Blues

Publié par Tinuviel sur 15 Juin 2009, 08:35am

Catégories : #POEMES EN VRAC

Le tango : une pensée triste qui se danse (Ernesto Sabato dans «Tango »)

 

Je les regarde danser,

Accolés mot à mot, en aparté mouvant,

Émouvant,

Éprouvant,

Coloré, co-leurré,

Au lyrisme cruel.

Envolées dévoilées, .

Exhibées,

Décomplexées,

Déshabillées, 

Désinvolte tango qui houle et qui chavire

En langoureux duo sur fonds de désir-dire,

Confessions extatiques,

Noire hermine,

Blanc granit,

Pureté de jais,

Vert-de-gris incertain

Qui chaloupe

Vers le bleu

Espéré

Aspiré,

Vogue vers le turquoise,

Le pers

Qui perd et manque,

Impair et passe... .

 

Je les regarde danser, 

Aérienne harmonie,

Enivrante oraison,

Déhanchement des âmes

- Somptueux d'indécence ! -

Pour dire l'intraduisible,

Qui éclate au soleil

Comme cœur de fruit rouge,

Et tache l'aile blanche

De l'ange

Sur laquelle trébuche

La candeur jaunie.

 

Je les regarde danser

En fondu enchaîné

Leur parade nuptiale,

Leur idylle idéale,

Entre sombre et lumière.

Et vole, papillonne,

Tournoie au vent le jupon vert,

Vert assorti au tain amer

Du miroir aux étoiles.

Joute frivole,

Indifférence batifole

Des amants synonymes

Qui s'animent,

S'illuminent,

Respirent et se proclament

L'un à l'autre

En notes inspirées.

Litanie éternelle

Qui se lit en sourdine

Au sens dessus-dessous des lignes,

De traits d'union en suspensions,

De demi-mots en demi-tons,

De contrepoints en diapasons.

 

Chanson double,

Chanson trouble,

Andante staccato,

Hypnotique tempo

Qui se démène,

Se déchaîne

Et enchaîne

Ses accords sibyllins,

Présages en si majeur,

Qui s'offrent,

S'enlacent

Et se délacent,

Au son des battements

D'un orchestre qui joue

Un air de déjà-vu,

De déjà su,

Et annonce, éclatant,

Le glas d'un autre bal.

 

En ce palais des glaces où résonne l'écho

D'un silence obstiné,

Les rêves en porte-à-faux,

Et les ombres chinoises,

Poupées russes fardées

Qui s'emboîtent sans bruit,

Ont fini par lasser mon cœur qui bat trop simple,

Qui respire trop clair,

Qui parle trop limpide,

Qui aime trop entier.

Agonie consumée

D'un restant d'impossible,

Scorie d'une passion

Qui le temps d'un instant

S'était trompée de quai,

Au train de nos chimères

Harassées.

 

Épuisée,

Apaisée,

J'effleure mes blessures

Qui déjà se referment,

Libérant mon regard

De son trop-plein de soif.

Malgré nos soliloques

Aux promesses de vent,

Malgré la mélodie

De nos voeux infertiles,

Au creux de nos peut-être

Qui voulaient tant survivre

Au printemps déserté,

Je n'ai pas réussi

À modeler l'absence

Et les cris inutiles

En un autre demain,

Plus riant,

Plus serein,

Allégé

Des mots factices,

Des serments si volages

Et des déroutes vaines

 

Alors...

D'ici ou de là-bas,

Battant la démesure

Du désir éperdu

Qui sourd de leur tango,

Et l'aveu impudique

De leurs pas cadencés,

 

Inerte et silencieuse,

 

Je les regarde

 

Danser.

 

 

 

Françoise Jeurissen/Tinuviel

Mai 2009

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