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Le temps des Avelines

Le temps des Avelines


Dormir...

Publié par Tinuviel sur 6 Décembre 2009, 21:43pm

Catégories : #NOMBRIL

 

Depuis quelque temps, me lever est difficile. C'est si lourd d'extirper mon corps de son nid douillet, de l'utérus rassurant de mon lit. Me jeter hors des plumes de l'amnésie, suspendre mon vol nocturne pour retomber pesamment sur terre, voire même plus bas. Le choc est rude à chaque fois. Même ouvrir les yeux, découdre les paupières, est une épreuve, l'impression de déchirer violemment le voile bienveillant du sommeil qui permet d'oublier toutes les laideurs, d'amnistier toutes les trahisons, de maquiller toutes mes défaites sous des kilos de rêves colorés. Mais tous les jours ça recommence. Le glas du rêve, fin de la trêve du marchand de sable, c'est l'heure d'entrer de plein fouet dans la vraie vie. Bienvenue, madame-monsieur, l'express de 7h15 pour le cafard va passer... pas besoin d'attacher vos ceintures, de toute façon, ça ne risque pas de secouer beaucoup par ici, tout est plat, sans relief, désespérément morne.


Et puis, se lever pour quoi ? Pour affronter la grisaille ambiante, le froid, la pluie qui ne s'arrête plus de tomber depuis des semaines, au diapason de ma brume intérieure ? Évidemment, je dois. Même si pour l'instant je ne bosse plus, même si je suis à peine encore une femme, au moins suis-je encore une mère ; je suis grande et responsable, donc je me secoue les écailles et je me lève. Même si, à peine levée, je me demande à quoi bon... pour affronter quoi ? Moi-même, encore et toujours ?


Non, le matin, je n'ai plus qu'une envie : rester sous la couette, et dormir, ou en tout cas somnoler, pour ne pas penser, pour ne pas affronter la vraie vie, celle qui fait mal et qui pèse si lourd, qui sent le moisi dans tous ses recoins, qui pue l'échec. Ma vie qui n'a jamais vraiment trouvé son chemin, qui est restée depuis toujours engluée dans la peur, dans la fuite, dans l'erreur de jugement, celle qui a gaspillé ses enthousiasmes et sa passion en paris stupides, celle qui a tout perdu au jeu, à force d'optimisme béat, à force de vouloir « se refaire ». Ma vie monocorde et imbécile.


Mais dans le creux de mon lit, je peux rêver. Au moins il me reste ça. D'ailleurs, je n'ai jamais fait que ça, quand j'y pense. Rêver, sans jamais atteindre ni réussir quoi que ce soit. A croire que je suis née pour tisser ma toile dans un monde parallèle, à croire que je n'ai qu'un seul pied dans cette vie-ci, et l'autre dans une autre dimension, très loin là-bas, dans un pays inaccessible.


Un jour, je ne me lèverai pas. Je ne me lèverai plus. Je dormirai pendant des jours et des jours et des semaines. Je me lèverai juste pour mes besoins naturels, le minimum vital. Je m'en foutrai de tout. Quand mes enfants seront plus grands, un jour, je baisserai les bras, je fermerai les volets, je mettrai tout sous clef et je dormirai pendant des années. Je ferai ma laide au bois dormant. Je rassemblerai mes deux pieds de l'autre côté de mon miroir, et je me loverai dans mes rêves, ceux où l'amour n'est pas cette triste et pauvre chose impuissante qui s'étiole, ceux où je n'ai pas besoin de ramer à contre-courant de tout pour essayer de ne pas chuter, ceux où il m'arrive de réussir à entreprendre quelque chose sans me sentir découragée d'avance, ceux où je ne passe pas ma vie à me couvrir de cendres, à m'étouffer dans ma culpabilité, à expier d'improbables fautes...


Et je me nourrirai du rire des anges, je boirai la lumière des étoiles rieuses, je flotterai, enfin débarrassée de ce corps gris et encombrant, et peut-être, qui sait, réussirais-je à prendre par la main une certaine petite fille perdue au milieu de nulle part, à lui dire « je t'aime », à lui dire « n'aie pas peur, n'aie plus peur, je suis là ».

 


 

 

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G
<br /> :-)<br /> Bisous<br /> Je suis arrivée ici pcq j'ai pensé à toi, j'ai pensé qu'il y a une éternité que je n'étais pas allé sur ton autre blog puis j'ai suivi le lien...<br /> <br /> <br />
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G
<br /> J'ai le coeur tout serré, pour toi, pour moi...<br /> <br /> <br />
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T
<br /> <br /> Merci, ça me touche beaucoup que tu me laisses tes petits mots...<br /> Si ça peut le désserrer, 2010 a bien mieux commencé que 2009 s'est terminée. Parfois, quand on touche le fond, on ne peut que remonter, non ?<br /> Je t'embrasse fort.<br /> <br /> <br />

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