l'hiver aux doigts crochus
s'agrippe à mes frissons
pendant que je t'attends
de ma terre de femme s'élève un chant sauvage
dont l'écho se fait lourd
dont l'écho se fait vain
dans l'épaisseur du soir
voilà cent ans au moins que j'espère ta voix
pour m'annoncer l'aurore
et lever la froidure
les champs parcheminés
s'étalent sous la neige
et grelottent tout bas
vides sillons de glaise attendant le redoux
comme j'attends ton pas
paix ! mon ventre en sommeil
il n'est pas temps d'aimer
un blé semé trop tôt ne voit jamais le ciel
quelque cri d'oiseau noir monte à l'assaut du vent
comme un vain sacrifice
car l'espérance crisse
sur le tableau des ans
quand on veut hâter l'heure
ainsi vient le printemps : il arrive en sursaut
au rythme de sa joie
déferlant comme l'eau
sans se mêler du temps
ni de notre impatience
comme à fleur de dégel
mon âme s'habille de brume
irisant les contours de mes souhaits mouvants
et inlassablement
comme un marin de terre égaré sous la lune
tu manques à mon appel
pourtant
je te sais si vivant aux lisières de mon coeur
où dans mes rêves bleus tu arpentes la vie
comme un marcheur d'étoiles
j'attends de t'accueillir au creux de ma douceur
pour mêler nos racines et gréer notre voile
au repos des pourquoi
sous mon limon de femme qui garde sa chaleur
en dormance
en patience
je protège ma source, y couvant mes promesses
comme sauvage louve
jusqu'au lever de joie